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Quel avenir pour l’Airbus des batteries ?

Véhicule électrique 24 Jun 2020

Les enjeux d’une alliance européenne des batteries

 

Communément appelé « Airbus des batteries », le projet européen d’alliance des batteries, porté par la commissaire européenne, Margaret Vestager depuis 2018, consiste en la formation de consortium entre Etats membres et certaines entreprises européennes, dans la production mondiale de batteries au lithium. Ce regroupement vise à assurer une indépendance énergétique à l’Europe, en produisant elle-même ses batteries, principalement destinées à l’industrie automobile.

 

Jusqu’alors, la production mondiale était largement dominée par des pays asiatiques, entrés dans la course depuis 10 ans, parmi lesquels le Japon, la Chine et la Corée du Sud, quand le seuil de production européen peinait à atteindre 1%. La montée en puissance de l’Asie dans la production de batteries est intrinsèquement liée au savoir-faire du continent en matière d’électronique. Aussi, de nombreuses entreprises et fleurons de l’industrie high-tech, à l’image de Panasonic, Samsung ou encore LG ont su mettre à profit leur expertise dans la production de batteries, confortant leur place de leader incontesté.

 

Pour l’Europe, « l’Airbus des batteries » représente un fort enjeu économique et énergétique jusqu’en 2031. En effet, cette alliance serait susceptible de générer des créations d’emplois, elle renforcerait également l’attractivité industrielle de l’Europe et représenterait une avancée significative pour la mobilité, en particulier électrique. Car pour certains observateurs européens, ce projet estimé à 8 milliards d’euros, est un moyen de sécuriser la production de véhicules électriques et par conséquent la filière automobile toute entière. De fait, plusieurs pays européens sont déjà engagés dans une démarche de transition énergétique, où le cap est axé sur la mobilité électrique et connectée.

 

Les entreprises européennes en ordre de marche

 

Depuis décembre 2019, Bruxelles a autorisé plusieurs Etats membres dont la France, l’Allemagne, la Pologne, l’Italie, la Finlande ou encore la Suède à investir les subsides européens dans ce projet qui comprend près de 17 participants directs de la filière. Le projet réunit des entreprises telles que le constructeur automobile BMW, le chimiste BASF ou encore Solvay. Enfin, ces entreprises engagées autour de ce projet, ont pour objectif de collaborer étroitement ensemble, mais aussi d’échanger avec des partenaires externes et des centres de recherche.

 

Si l’Europe se félicite de ce chantier, c’est aussi parce qu’elle se fixe comme ambition de devenir le premier continent neutre en carbone d’ici 2050 et d’être capable d’héberger l’ensemble de la chaîne de valeur des batteries en Europe, s’assurant ainsi une réelle autonomie énergétique.

 

A ce jour, quelques initiatives transnationales ont été annoncées, parmi lesquelles celle du constructeur automobile Opel (PSA) et du groupe de chimie BASF en février. Les deux acteurs se sont accordés sur la construction d’un site (gigafactory) dédié à la production de cellules de batteries pour véhicules électriques en Rhénanie. Cette unité devrait fournir les sites Opel et PSA. Enfin, à la même époque, BASF avait annoncé la construction d’un site supplémentaire au sud de Berlin, dans le Brandebourg, spécialisé dans la production de cathodes (CAM), l’un des principaux composants utilisés pour les batteries lithium-ion

 

Plus récemment, certaines entreprises ont été exhortées à prendre part au projet d’Airbus des batteries. Fin mai, l’Etat a concédé à Renault un prêt garanti de 5 milliards d’euros, à la seule condition que l’entreprise prenne un engagement dans ce projet européen et en devienne actionnaire, emboîtant le pas à PSA.

 

Une technologie encore difficilement maîtrisée

 

Même si l’engouement pour la production de batteries au lithium est important, il existe encore des obstacles technologiques majeurs. Pour certains chercheurs et scientifiques, la production standardisée de ces batteries ne sera pas envisageable avant 2030, compte tenu des difficultés persistantes à la production d’une batterie tout-solide dans un modèle industrialisé. A contrario, le Japon a distancé l’Europe depuis 2011, ayant une parfaite maîtrise de l’ensemble de la chaîne de valeur.

 

Même si l’Europe reste déterminée à prendre part à la bataille de l’électrique, combien de temps lui faudra-t-il pour concurrencer la Chine et rattraper son retard ? Car la Chine concentre aujourd’hui la moitié de la production mondiale des véhicules électriques, à l’heure où les projections de ventes en faveur de l’électrique sont exponentielles.

 

Enfin, autre difficulté, les matières premières indispensables à la fabrication des batteries, comme le lithium, sont peu présentes en Europe et sont essentiellement localisées en Asie, en Amérique du Sud ou encore en Australie, là où la Chine exerce une main mise depuis plusieurs années sur ce marché. L’approvisionnement pourrait devenir un obstacle supplémentaire pour l’Europe, contrainte de réfléchir à des alternatives concrètes afin d’éviter une bataille du lithium.

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